Dans un contexte de réchauffement climatique qui pourrait induire des phénomènes de sécheresses récurrents, la culture du maïs est de plus en plus contestée. La controverse née autour de cette culture tient autant pour les conséquences en terme de consommation en eau que pour la remise en cause du modèle agricole productiviste qu’elle incarne par excellence.Existe-t-il de nouvelles perspectives pour le maïs en France? Quelques éléments de contexte économiqueLa France s’affiche comme le premier producteur de maïs grain en Europe avec près de 15 Mt produites en 2011 et 2012 1.  Le grand Sud-ouest totalise 41 % de la production de maïs grain française dont 20% en Aquitaine et 11% en Midi-Pyrénées 1. Ainsi une majeure partie de cette production alimente les filières agroalimentaires et agroindustrielles régionales.On comprend alors l’importance de préserver cette richesse économique régionale.Etat des lieux de l’usage agricole de l’eau en FranceChaque année,en France on estime à 38 milliards de m³ les prélèvements en eau imputés aux activités humaines 2. La part attribuée aux usages agricoles est de l’ordre de 14% 2.Depuis les années 1980, le développement accru de l’irrigation induit de nouveaux problèmes:

  • Une majeure partie des prélèvements à des fins d’irrigation n’est pas restituée au milieu.
  • Les systèmes d’irrigation par aspersion sont particulièrement sujets à l’évapotranspiration. A titre d’exemple en 2000, 80% des prélèvements sont réalisés par aspersion ce qui représente 2000 m³ à 3000 m³ par hectare et par an 2.

Dans le Sud-Ouest, on estime à plus de 800 millions de m³ d’eau les prélèvements nets en période d’étiage, correspondant à un débit supérieur à ceux de la Garonne, l’Adour et la Charente 2Facteurs explicatifs du développement de la culture du maïs irrigué? (Exemple du bassin de l’Adour)

  • La contractualisation des systèmes de production (maïs semence & maïs doux) apporte une rémunération avantageuse pour les agriculteurs. Ces derniers sont incités à irriguer pour maximiser les rendements et répondre aux exigences de qualité demandées par les transformateurs 3.
  • Le développement de l’irrigation dans les années 80 a largement été affiché comme un choix stratégique par les politiques publiques afin de favoriser les cultures « sous contrats » et l’intensification de l’agriculture 3.
  • La nature sableuse des sols induit une faible capacité de rétention de l’eau 3.
  • Les facteurs pédoclimatiques et la composition des sols accentuent les risques de sécheresse rendant l’irrigation nécessaire 3
  • L’existence d’une nappe à faible profondeur et l’absence de relief facilite le pompage de l’eau 3.

Des solutions alternatives?Le maïs est une plante dont la photosynthèse est dite en « C4 » (le premier glucide formé comporte quatre atomes de carbone). Cette caractéristique biochimique lui confère une efficacité photosynthétique et une efficience de l’eau bien supérieure à celles des plantes en « C3 » comme le blé ou l’orge. A titre d’exemple pour produire 1 kg de matière sèche, le maïs grain consomme 454 litres d’eau alors que le blé en consomme 590 litres 4).Néanmoins le principal inconvénient du maïs réside dans le fait que ses besoins en eau se situent au cours de la période estivale (80 % de l’eau est prélevée en été 1) durant laquelle la pluviométrie est faible.

Source: Arvalis-Institut du Végétal
 

Toutefois il existe des solutions alternatives à la culture du maïs:

  • Les agriculteurs ont la possibilité de choisir de cultiver d’autres variétés et d’autres espèces comme le sorgho et le tournesol qui consomment moins d’eau. Néanmoins ces cultures sont moins rémunératrices que le maïs.
  • La luzerne, tant pour ses avantages agronomiques qu’environnementaux, pourrait constituer une alternative au maïs dans les systèmes fourragers.
  • Les cultures d’esquives comme les céréales d’hiver dont la récolte est effectuée avant la période estivale permettraient de réduire les prélèvements en eau.
  • L’Agriculture Écologiquement Intensive, qui a pour objectif d’élaborer de nouveaux modes de production agricole reposant sur une plus grande valorisation des services écosystémiques, pourrait contribuer à améliorer le bilan en eau du maïs.
L’apport de la télédétection Le CESBIO est impliqué dans plusieurs programmes de recherche avec pour fil conducteur une gestion efficace de la ressource en eau:

  • Le projet FUI-MAISEO porté par le groupe coopératif VIVADOUR en partenariat avec PIONEER, GEOSYS, la CACG, METEO FRANCE, le LAAS et le CESBIO dont l’objectif est de développer de nouvelles approches pour maintenir la production de maïs grain et de mieux gérer la ressource hydrique au niveau d’un territoire. Ce projet transversal aborde la problématique de la gestion de l’eau en agriculture selon les aspects suivants:
    • Agronomique par le levier génétique;
    • Modélisation météorologique;
    • Modélisation hydrologique;
    • Diagnostic hydrique par la modélisation agronomique;
    • Des solutions opérationnelles au service des agriculteurs.
  • Le projet CASDAR-SIMULTEAU (ARVALIS, INRA, CESBIO, la CAGC, Chambre Régionale d’Agriculture de Midi-Pyrénées, Chambres Départementales d’Agriculture du Gers, des Hautes-Pyrénées et du Tarn) dont l’objectif est de mettre au point, avec les Organismes Uniques de Gestion Collective partenaires, un modèle de territoire pour la conception et l’évaluation:
    • de plans de répartition du volume prélevable,
    • de protocoles de gestion collective en cours de campagne.

Au sein de ces projets l’apport de la télédétection vise à fournir une cartographie des assolements et des surfaces irriguées en cours de campagne et à l’échelle d’un territoire.Ainsi la connaissance de cette répartition spatiale suffisamment tôt dans la saison doit permettre une meilleure estimation des besoins en irrigation et éventuellement un ajustement des volumes d’eau disponibles pour les irrigants.Au CESBIO, les développements méthodologiques sont bien avancés et apportent de premiers résultats que je vous présenterai dans un prochain billet.

Sources:

1 http://www.inra.fr/l_institut/expertise/expertises_realisees/secheresse_et_agriculture_rapport_d_expertise

2 Usages agricoles et ressource en eau; Jean-Pierre Amigues & Alban Thomas (INRA,Toulouse),Sophie Allain (INRA Paris-ENS de Cachan), Isabelle Doussan (Universite de Nice), Stéphane Ghiotti (CNRS, Montpellier)

3 Barbut & Poux (2000)

4 http://www.gnis.fr/files/distributionagricole/Chapitre_1_Introduction_Produire_plus_et_eau_annexes_irrigation.pdf?id=377

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.