Darmstadt, envoyé spatial

 

Grâce au Cnes, j’ai eu la chance de participer à l’évènement « social » #Sentinel2Go organisé par l’ESA à l’occasion du lancement de Sentinel-2B au centre des opérations de Darmstadt (ESOC) dans la nuit du 6 au 7 mars. L’ESA avait sélectionné une centaine de space-nerds, twittos, bloggers et autres youtubers de tout poil, et nous avait concocté un programme copieux (comme le dîner) qui nous a tenu éveillés de 14h à 5h du matin.

 

Nous avons d’abord été accueillis dans différents services de l’ESOC où les ingénieurs présents nous ont expliqué leur travail quotidien. Par exemple nous avons rencontré l’équipe qui surveille les débris spatiaux afin d’éviter les collisions avec la flotte des satellites de l’ESA, ou encore l’équipe en charge du plus ancien satellite de l’ESA encore en activité, XMM-Newton. Pour opérer ce satellite d’observation astrophysique, une permanence humaine est requise 24/24, 7/7 depuis 1999. Pour les Sentinels un contrôle humain hebdomadaire est suffisant car l’informatique a bien progressé depuis 1999 (« remember how was your smartphone in 1999 »). Nous avons aussi vu le service en charge des différentes antennes au sol qui permettent la communication avec les satellites et la réception des données acquises. Une des antennes étant située dans un parc naturel, l’ESA doit faire appel à des fauconniers pour chasser les oiseaux qui nichent à l’intérieur. A la fin de la journée, Thomas Ormston, ingénieur à l’ESA, a brillamment exposé les différentes étapes d’un lancement, depuis le décollage de la fusée jusqu’à la réception du signal par le centre de contrôle de l’ESOC, et comment l’équipe en charge du démarrage de la mission s’est minutieusement préparée à réagir en cas d’imprévu.

 

Tom nous a demandé surtout de ne pas applaudir après le décollage car tout peut encore arriver tant que le satellite n’est pas en orbite et n’a pas établi de communication avec le centre de contrôle.

 

Le lancement était retransmis en direct depuis Kourou, avec une liaison impeccable qui donnait la sensation bizarre d’être juste à côté du pas de tir. Pendant les dernières secondes du compte-à-rebours la salle est devenue terriblement silencieuse. A 02:49:24 le lanceur Vega est parti … comme une fusée (on nous avait prévenu « don’t blink your eyes when the countdown hit zero .. you don’t mess with a Vega launcher »). Quelques secondes après le décollage nous avons évidemment tous applaudi de bon cœur.

 

Une heure plus tard, Sentinel-2B se séparait pour de bon de son lanceur. L’équipe de l’ESOC prenait alors le relais du centre de Kourou, et annonçait dans la foulée que la communication avec Sentinel-2B était bien établie, puis que les panneaux solaires s’étaient correctement dépliés. Cette fois les applaudissements étaient de bon aloi. Le champagne et le space cake aussi.

 

La mission Sentinel-2B a donc démarré. D’ici quelques mois nous devrions avoir accès aux premières images (d’après des infos saisies en off, ce ne serait pas avant octobre 2017…).

 

En tant que scientifique utilisateur des images Sentinel-2, je mesure mieux à présent l’ampleur et l’excellence du travail réalisé pour parvenir à une mission opérationnelle qui délivre des données de qualité (même si tout n’est pas parfait). C’est le fruit d’une exigence de longue haleine qui encourage à tirer le meilleur des données.

 

Enfin, je trouve que cet évènement #Sentinel2Go placé sous le signe des réseaux sociaux est une réussite. Même si les photos de groupe, les selfies à répétition et la vacuité des réseaux sociaux peuvent prêter à sourire, ce fut un très joli coup de communication car chaque invité présent a pu transmettre avec son langage et sa sensibilité un peu de l’excitation de l’aventure spatiale. En multipliant les porte-paroles, quitte à perdre en partie le contrôle de sa communication, l’ESA a sans doute élargi sa sphère habituelle de diffusion de ses activités en observation de la Terre et c’est tant mieux. Comme l’a écrit Olivier, l’Europe peut être fière de Sentinel-2 et plus largement du programme Copernicus. Hier soir à Darmstadt j’étais fier et heureux d’être européen. J’aimerais que davantage de citoyens aient une expérience aussi positive de l’Europe.

A Sentinerd

One thought on “Une nuit à Darmstadt

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